Armuriers/couteliers, une espèce devenue rare.
Alors je m’arrête devant ce magasin « Chasse & Pêche ».
Parking désert, rideau baissé sur l’une des deux entrées.
Par contre, à l’intérieur, c’est plein d’articles.
Avec une odeur curieusement agréable.
Et des couleurs qui font dans la discrétion.
Un jeune est au comptoir, je m’adresse à lui.
Je lui pose une question « Réglementation ».
Son visage devient vert, mimétisme oblige.
« Je vais appeler le patron » dit-il en s’enfuyant.
Un homme à la mine sympa arrive.
La quarantaine, simple et avenant.
Je lui demande quel type de couteau je peux avoir sur moi.
Évidemment lors de mes randonnées, que je partage parfois ici.
Il m’arrive de traverser des villages, de rencontrer des gens.
« Je vous conseille de demander à la gendarmerie ou à la police.
En ce moment, même moi, je ne sais plus.
Avec eux, même un poireau devient une arme. »
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Le « eux », c’est pour les politiques aux commandes.
Mais aussi pour ceux qui leur obéissent.
« Forces de l’ordre », gendarmes et polices diverses.
Le coup du poireau, je ne m’y attendais pas.
Il m’a fait rire intérieurement.
Même si la situation est triste.
Avoir un couteau sur soi peut sauver en randonnée.
Soi-même, comme les personnes qui vous accompagnent.
C’est vital et non négociable, question de sécurité.
Je lui explique que mon couteau suisse ne me suffit plus.
C’est super utile et plein de fonctions.
Mais, question « couteau », c’est insuffisant.
Il me comprend parfaitement et la discussion s’engage.
D’homme à homme, une discussion politiquement incorrecte.
Et pourtant passionnante, concrète, « vraie vie ».
Il me montre son fidèle couteau de poche à lame bloquante.
En fait, c’est exactement ce que je cherche.
Il jongle avec, le manipule en passionné.
Il dit l’utiliser au moins trente fois par jour.
Bien sûr, pour dépecer, éviscérer du gibier, il utilise autre chose.
Mais, au quotidien, il ne pourrait s’en passer.
Il me parle chasse, nature, à sa façon.
Que je n’approuve pas, mais que je comprends.
Il est chasseur, moi pas.
Il me montre ce qu’il a en vitrine.
Puis sort d’énormes catalogues et tourne les pages.
Il les commente au fur et à mesure.
Il ne sait pas si je suis acheteur.
Mais il me montre tout ce qu’il peut commander.
Et il n’essaye même pas de me vendre quelque chose.
Il me cite des marques, me conseille.
Au risque que j’aille ensuite sur Internet.
Pour commander, éventuellement une contrefaçon.
Il me répète « Mais allez les voir ».
En me parlant des flics.
« Au moins, vous saurez quoi faire ».
Sauf qu’il sait que je n’aurai pas une vraie réponse.
Comme il me dit « Moi, je n’ai jamais eu de problème ».
Et il se balade tout le temps avec.
Puis je lui demande de ressortir ceux qu’il m’a montré.
Je peux les manipuler, vérifier le jeu éventuel.
Tester l’ergonomie, l’efficacité.
Nous rigolons devant certains modèles.
Il me montre une gamme « Bear Grylls ».
Genre survie, avec pierre à feu et machette en option.
Pas besoin de ça compte tenu de mes activités.
Plutôt me fier à ce gars qui sait de quoi il parle.
Et prendre le même couteau que son compagnon de poche.
Ça n’est pas le plus cher, et il en a deux en stock.
Je repars avec un couteau américain à 32,90 €.
En vente à 22 $ aux USA.
Mine de rien, humainement, j’ai passé un super moment.
De quoi réconcilier, un peu, avec le « commerce ».
Et, tant qu’à être arrêté par la police…
Je préfère mon surin à un poireau !
Vignette : « Bruits de bottes, armes de destruction massive » © PF/Grinçant.com (2016)
© PF/Grinçant.com (2016)
Quelques billets en rapport :
J’ai toujours été impressionné des interdits en vigueur… On interdit tout ce qui peut blesser sans tenir compte du fait qu’une personne mal intentionnée n’en aura absolument rien à faire. Les autorités de contrôle elle même en devienne chèvre et ne savent, en général, pas donner de réponse claire. Il y a bien plus de blessés par accident de voiture avec des chauffards que de blessés par armes blanches… Mais comme l’état touche un sacré pécule sur chaque véhicule ça les gène moins qu’un promeneur avec son couteau à champignon.
Sans compter que c’est « non négociable », et c’est bien précisé dans mon texte.
Dans ce genre d’activité (rando), un couteau peut vraiment sauver la vie…
Maintenant, quant à l’avoir à la ceinture, dans un étui, en traversant un village et en rencontrant une voiture de gendarmerie…
Le mettre dans le sac évite les polémiques, mais c’est de la pure hypocrisie, et ça obère la sécurité en situation d’urgence.
Un simple bâton de marche peut être une arme largement aussi dangereuse ;-)
Pour répondre (un peu) à votre question:
Il est totalement interdit de porter une arme blanche. Notons le terme de « porter » et non « posséder » :) Cependant, comme pour pas mal de choses c’est à l’appréciation des forces de l’ordre. En gros le couteau dans le métro c’est risqué, le couteau en forêt c’est « toléré ».
Effectivement, et il n’est pas impossible que cela fasse l’objet d’un autre billet ici tellement la « réponse » est peu évidente et finalement très symptomatique de notre société et de ses « législateurs »…
Je pense, sans vouloir décourager une idée de Grinçant, que développer le concept d’emport/possession d’arme « blanche » ou pas risque de ne pas coller à la réalité.
Les catégories d’armes sont clairement définies dans notre législation, les contextes sont également envisagés.
Le couteau suisse, Leatherman pour moi, acheté en opération interalliée m’a sauvé la mise plus d’une fois, y compris dans la vie normale. Je ne me présenterai pas avec à un contrôle d’embarquement ou de « sécurité », mais il me suis partout en randonnée pédestre ou moto, VTT, Combi, etc.
Les officiels eux-mêmes en contact avec la population civile sont dotés d’armes de guerre au sens strict, ça je ne le conçois absolument pas. Une bête grenade à plâtre dite d’exercice en est une. Alors leur dispositif actuel est un non sens au milieu de personnes non armées, simples manifestants ou reporters. Les mêmes guignols ne feraient pas 10 mètres dans une banlieue…
Tout ça pour dire que rien n’est respecté, en tout cas pas le bon sens, et depuis le plus haut niveau, ça promet !
« Les catégories d’armes sont clairement définies dans notre législation, les contextes sont également envisagés. »
Et justement non, et ça a d’ailleurs changé récemment !
C’est carrément ubuesque au niveau du « cadre législatif ».
D’où, d’ailleurs, la réponse de ce valeureux/malheureux commerçant qui me renvoyait chez les forces de l’ordre, sachant que c’est justement laissé à leur « libre interprétation » & « tolérance » ! (Pratique dans un pays qui devient totalitaire.)
Au fait, ce qu’il m’a vendu, justement, en bon connaisseur ;-)
Un couteau de poche Leatherman C33 (américain), pour accompagner mon fidèle Victorinox (suisse).
Basique, mais pratique et efficace.
J’aime bien le stock d’armes chez le trafiquant, ces poireaux ont l’air redoutable en effet ! Et ne serait-ce pas des grenades à droite ? ;)
Concernant les couteaux de poche, des amis français m’avaient dit (mais est-ce encore d’actualité ?) qu’à partir du moment où le couteau n’était pas à cran d’arrêt, c’était légal. Autrement dit, mon brave Opinel était parfaitement illégal à cause de sa bague de verrouillage… mais ce qui est jugé dangereux par la loi, je le considère au contraire comme une nécessaire sécurité pour mes doigts !
Oui, joli stock ;-)
Et je ne comprends pas que la préfecture ne fasse pas fermer illico cette armurerie ;-)
Quant aux couteaux à blocage de lame par virole (l’Opinel étant le plus connu), c’est considéré comme un « cran d’arrêt », et c’est effectivement « interdit », même si tout cela reste dans le non-dit/non-écrit explicitement…
Une lame qui se referme sur un doigt/une main est une (très) mauvaise expérience :-/
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